N.
FRANÇOIS-MARIE DE LALLEE, BARON DE SONGY
Le château
de Songy existe encore sur la commune de Saint-Sylvestre et sur la rive
droite du Chéran. Le dernier baron de Songy s’est rendu
célèbre par ses excentricités dont on parlait
encore dans le pays cent ans après.
François-Marie de Lallée est le fils de N.Louis-Henry de
Lallée, baron de Songy et de Louise de Carpinel. D’abord
officier au Régiment de Tarentaise, il mènera bien vite
une vie dissolue.
Pourtant
doué des meilleures qualités, le baron a reçu de
son père, lui-même chargé d'une trop nombreuse
famille, une éducation quelque peu négligée.
Livré à lui-même lors d'une campagne de son
père, il s'adonne au vin et recherche la compagnie des oisifs et
des débauchés.
En 1770, à
deux reprises, il est décrété de prise de corps,
la première fois pour avoir facilité, dans la nuit du 3
au 4 décembre 1769, l'évasion de plusieurs détenus
de la prison de Bonneville ; la seconde fois dans la nuit du 26 au 27
du même mois, pour avoir donné à Chêne un
coup d'épée à un soldat.
Lancé sur
une mauvaise pente, il dilapide la fortune de sa femme, née
Anne-Marie de Rochette qu'il avait épousée le 8 juin 1756
à Annecy. Ensuite, il recourt au vol pour satisfaire son
penchant à l'ivrognerie et à la débauche.
Dans la nuit du 17
au 18 février 1772, sur les dix heures, accompagné de
quatre mauvais sujets, il se rend à la ferme de son père
ascensée à un sieur Beauquis. Le valet de ferme refuse
d'ouvrir; la porte est enfoncée et le valet ligoté ; le
baron s'empare des quatre bœufs qu'il confie à deux de ses
hommes. Avec les deux autres, il se présente à une autre
ferme tenue par un certain Violet où le valet se retrouve
attaché et d'où il emmène quatre boeufs et une
vache.
Les valets pris en
otage doivent les suivre et le groupe se dirige vers Rumilly, afin de
gagner Genève. Les fermiers, aidés d'un
détachement de dragons de Rumilly, les poursuivent et les
rattrapent.
Pour les deux
premiers faits imputés à Songy, le Sénat de Savoie
prononce une condamnation en juillet 1770 de dix ans de prison. La
famille du baron craignant pour l'avenir des écarts plus graves
encore, supplie le Roi de le faire enfermer dans une forteresse et
s'engage à pourvoir à ses dépenses.
Il n'est
arrêté qu'en 1772 à la suite du vol de
bétail. La clémence royale lui évite les
galères à vie, peine infamante pour un gentilhomme. Le 22
février, le baron est traduit, par ordre du Roi, au fort de
Miolans, "pour y être tenu fermé sous clé". La
famille, très gênée, ne verse
régulièrement la pension mensuelle de 25 livres que
pendant une année. Le Roi donne ordre au Gouverneur de Savoie de
payer la pension.
Le dix
décembre suivant, le marquis de Sade, accompagné de son
domestique, vient partager la détention du baron. Les trois
hommes s'acoquinent et s'évadent dans la nuit du 30 avril au
lier mai 1773. lis prennent la route de Grenoble puis se
séparent.
Arrivé
à Paris, le baron de Songy se trouve isolé et
démuni. A l'aide de son nom et de prétendus parents dont
il se réclame, il abuse ses fournisseurs et fait de nombreuses
dettes. Traqué, il s'enfuit de Paris mais il est
arrêté à Villejuif à deux lieues de la
capitale. Confronté à ses créanciers, il les
maltraite et les injurie, ainsi que l'officier de gendarmerie qui l'a
arrêté.
Dans un moment de
désespoir, il se donne plusieurs coups de couteau dans la
poitrine et on le transporte chez les fous à Charenton.
Reconduit ensuite à la frontière, il est
intercepté au Pont-de-Beauvoisin et réintègre la
prison de Miolans, le 21 mai 1777. Son épouse ruinée est
contrainte de faire la maîtresse d'école à
Chêne. Son père, accablé de chagrin et de dettes
meurt en février 1778 et sa mère est trop
âgée pour s'occuper de ses affaires. Le Roi lui rend une
nouvelle fois la liberté le 26 février 1778.
A peine
rentré chez lui, il recommence ses brutalités et donne de
nouveaux sujets de plaintes. Le 24 février 1783, il est
interné au château d'Annecy, mais cédant aux
supplications de sa femme, le Roi le fait élargir le 3 mars
suivant.
Il reprend sa vie
dissolue et impose à sa femme la présence d'une concubine
et des trois enfants qu'elle lui a donnés (octobre 1787).
L'épouse outragée se retire alors à Rumilly chez
un de ses parents, le baron de Chabod.
Le baron de Songy
décédera des suites d'une chute de cheval le 8 novembre
1797.
Jean BRUNIER
extrait du bulletin des Amis du Vieux
Rumilly et de l’Albanais, n°18, année 2000

Vue du Château de Songy (photo 2006)